Près du métro Malakoff, la place du 11 Novembre est le lieu d'une fiction urbaine plastique et sonore pour 14 performeurs . Danse, jeu, contorsion, slam, vidéo, lumière, feu, paysages sonores, sont les données hétérogènes qui s'enchâssent dans un parti-pris compositionnel cohérent et unique. Les visiteurs qui déambulent sur cette place sont les témoins et les acteurs (passifs et actifs) de couches superposées d'évènements qui nous parlent de notre Humanité. Tout commence par cette sorte de musée à ciel ouvert : une grande Installation polymorphe ou plutôt 10 installations prismatiques qui mettent en scène certains objets obsessionnels de notre "modernité" : téléviseurs, bagnole, armée de chemises rouge, semis de poupées démembrées, un champs de vêtements abandonnés qui rappelle les amoncellements de Boltanski. Evocation de massacres, de disparus, de la violence, de notre folie, de nos corps, de la mémoire, de l'Histoire. Petit à petit émergent des figures agissantes qui créent un cheminement en apparence non narratif dans ce colori contextuel. Plus loin, les frontières deviennent poreuses, et tous se rassemblent autour d'un feu. Un feu purificateur autour duquel se met en marche un choeur Dionysiaque, à la nudité primitive, nouvelle identité collective porteuse d'espoir. Un geste saisissant à la poésie fulgurante, questionnant, bouleversant, dont le plus important demeure souvent dans la latence, en marge de ce qui est exécuté. Comment oublier le rire jubilatoire de cet enfant devant le spectacle d'un drame ? De quoi se rappeler que le spectacle n'est pas qu'une simple catégorie de la culture ordinaire mais l’expérience temporelle d’un regard ouvert sur des signes.
Merci à ceux qui nous donnent encore Foi en l'Homme.
Dans le cadre d'une série de rétrospectives de grands artistes contemporains, le centre Pompidou accueille l’un des acteur majeur de l’abstraction géométrique de la seconde moitié du XXe siècle : François Morellet, qui choisit de réinstaller "certaines mises en places éphémères d'éléments légers" conçus depuis les années 60. En tout, 27 installations qui renaissent et reposent principalement sur l'idée de trame, de grille, d'effets cinétiques évoquant aussi le minimalisme, les dadas. Ce rapprochement entre cinétisme et minimalisme peut paraître incongru. En effet, l'art cinétique, l'art optique, à été vécu par les artistes Américains du milieu des années 50, comme un art entièrement soumis à la seule logique de la vision alors que l'art minimal possède une dimension ouverte à d'autres types d'expériences. Donald Judd dénonca d'ailleurs le cinétisme auquel il opposa Franck Stella, figure emblématique de l'art Americain du tournant des année 60.
Pourtant, malgré ces influences, références que l'on est tenté de voir dans son oeuvre, difficile de s'appuyer sur de grands mouvements en "isme" pour définir l'oeuvre d'un artiste aussi libre que Morellet, qui vrille sans cesse les règles qu'il se donne et échappe à la contrainte initiale dans laquelle il contient son travail. Ni minimal ni cinétique ni conceptuel ni dada et pourtant, peut être tout ça à la fois. Morellet me met en face de ma propre difficulté à juger.
"GRAV" est le nom que se choisit en 1960 le Groupe de Recherche d'Art Visuel, groupe d'artistes fondé à Paris dans le contexte de l'art optico-cinétique, et dont François Morellet est l'un des fondateurs. "GRAV", peut-être un jeu de mot ambiguë pour un artiste que la gravité physique des objets semble intéresser mais qui n'a de cesse de nous rappeller à une "insoutenable légèreté de l'être" ou trop de gravité, trop de sérieux n'est plus à propos. Une oeuvre déstabilisante, au sens premier et second du mot, puisque l'on se sent physiquement et psychiquement en déséquilibre devant ces "réinstallations" que pourtant rien ne semble éloigner, à première vue, du concret, de la matérialité de l'oeuvre.
Les oeuvres : néons, lumières, projections, bois, papiers sérigraphiés, bandes adhésives, toiles sur châssis, tubes d'aluminium, plaques de métal, sont mises en évidence, pour la plupart, à partir du fond blanc (toile ou mur).
Mais qu'a-t-on réellement sous les yeux ? Et qu'est-ce que voir ? Qu'est ce que dire ce que l'on voit ? Qu'est-ce que faire voir ? Qui dit ce qu'il faut voir ?
Certaines oeuvres sont faites d'un système de lignes qui se prolonge au delà de la composition donnant le sentiment d'un fragment, d'un tout qui reste indéterminé et bouleverse nos stabilités visuelles. Les bandes quittent le champ de l'image pour se déployer là ou l'esprit peut les faire aller. C'est comme si on était en présence d'une réalité concrète et d'un devenir abstrait (devenir purement mental qui échappe au cadre qui le contient). Les oeuvre de Morellet assumerait ce double mouvement de contenir un réseau de lignes mais de suggérer quelque chose qui se déploie au delà de l'espace.
Mais alors qu'est-ce qu'une oeuvre qui ne nous dit pas à quelle famille elle appartient et qui échappe sans arrêt à tout enfermement ? Qu'est-ce qu'une oeuvre qui ne nous dit pas ou elle voudrait en venir ? Qu'est ce qu'une oeuvre qui nous laisse en suspens ? Est-ce une oeuvre qui préfère le voyage à la destination ?
liste des oeuvres présentées :
1. "Néons 0°-45°-90°-135° avec 4 rythmes interférents" 1963-2011 2. 2 trames de parallèles inclinées à 30° et 40° sur 3 murs, 1977-2009 3. Répartitions aléatoire de 40 000 carrés suivant les chiffres pairs et impairs d'un annuaire de téléphone, 50% bleu, 50% rouge, 1963 4. Rouge, 1964 5. La Joconde déformée, 1964 6. Reflets dans l'eau déformés par le spectateur, 1964 7. Arc de cercle sur 3 murs, 2011 8. 2 trames de tirets 0°-90° avec participation du spectateur. 9. 2 trames 45°-135° de néons interférents, 1972 10. Structure infinie de tétraèdres limitée par les murs, sol, plafond d'un pièce, 1971 11. Strip-teasing, 2009 12. 4 trames en dessin et en relief, 1981 13. Géométree no 93, 1985 14. Géométree no 5 arc de cercle complémentaires, 1983 15. Picasso défiguré (les demoiselles d'Avignon), 2011 16. Delacroix défiguré (La mort de Sardanapale), 1989 17. π Weepig Neonly no 3, 2003 18. No end Neon, 1990 19. Neons by Accident, 2003 20. Papier 2,5°_92,5°, trou (carré) 0°_90°, 1981 21. L'avalanche, 1996 22. π rococco no 22, 1=10°, 1997-2008 23. 4 angles droits composés de 2 poutres coupées d'onglet et de 2 lignes au mur, 1982 24. Carré à demi libéré no 1, 1990 25. Interférences de 4 adhésifs et de 4 carrés de papier, 1977-2011 26. Supperposition d'une surface exposable avec cette même surface basculée à 5° 1977-2011 27. plus ou moins, 1975-2011
François Morellet : "Réinstallations", exposition au centre Pompidou jusqu'au 4 juillet 2011. Nocturnes tout les jeudis jusqu'à 23h (fermeture des caisses à 22h)